PROJET ECOCONV 2012-2014

Développement d'un procédé de conversion chimique sans chrome hexavalent pour la protection des alliages d'aluminium aéronautiques
La Santé, la Sécurité et l'Environnement dans l'industrie font l'objet de préoccupations majeures qui ont un impact de plus en plus important sur les procédés de fabrication mis en œuvre par les entreprises manufacturières. C'est notamment vrai dans la métallurgie et le travail des métaux, pour certaines activités comme le traitement de surface, qui utilisent des produits chimiques dangereux et produisent des effluents/résidus toxiques.

Concernant les alliages d'aluminium utilisés dans le secteur aéronautique, 95 % des pièces font l'objet de traitements de surface dans le but d'obtenir des propriétés de résistance à la corrosion. Les procédés utilisés depuis plusieurs dizaines d'années mettent en œuvre du chrome hexavalent, sont très performants mais sont classés CMR (Cancérogène, Mutagène et Reprotoxique). En effet, les pièces sont traitées soit par un procédé d'anodisation chromique, soit par un procédé de conversion chimique à base de chrome hexavalent (Alodine 1200®). Le traitement de conversion chimique est préféré à l'anodisation, même si la protection contre la corrosion est inférieure, dans les cas où il est nécessaire d'assurer une conductivité électrique sur la pièce.
La problématique sur le chrome hexavalent est mondiale mais l'urgence de la situation est imposée au niveau européen par la réglementation REACH (Registration Evaluation Administration of Chemicals). En effet, l'Agence Européenne des produits chimiques, l'ECHA (http://apps.echa.europa.eu), est en charge d'étudier les dossiers d'enregistrements et d'autorisations déposés par les industriels. Ces dossiers doivent indiquer le domaine d'utilisation du produit ainsi que sa dangerosité. Dans un premier temps, l'ECHA vérifie et valide ces dossiers d'enregistrements. Ensuite, elle cible les substances les plus dangereuses qui seront listées dans l'annexe XIV du règlement REACH (N°1907/2006), et ainsi soumises à autorisation.

Pour utiliser une substance soumise à autorisation, il faudra qu'un dossier de demande d'autorisation pour une certaine application soit validé par l'agence européenne des produits chimiques. Ce dossier peut être déposé par un fabricant, un fournisseur ou un utilisateur de produits. Si aucun dossier n'est déposé ou si le dossier est rejeté par l'ECHA, le produit sera interdit de commercialisation à partir d'une date butoir, indiquée dans l'annexe XIV.

Ainsi, pour qu'une entreprise puisse utiliser un produit il faut que celui-ci:
- soit enregistré dans le domaine d'utilisation correspondant
- soit absent de l'annexe XIV ou autorisé par l'ECHA après validation du dossier d'autorisation

A ce jour, le trioxyde de chrome utilisé dans le bain d'Alodine 1200® est enregistré pour l'application traitements de surface, et peut par conséquent être encore utilisé. Cependant, cette substance est citée dans la « candidat list » et pourrait à court terme passer dans l'annexe XIV du règlement REACH « Liste des substances soumises à autorisation ». Ainsi, un dossier de demande d'autorisation devra être déposé et validé par l'ECHA pour que les fabricants, fournisseurs et utilisateurs puissent continuer à exploiter ce produit mais la procédure sera très complexe et très couteuse. De plus, l'ECHA acceptera la demande d'autorisation et ainsi l'utilisation du produit uniquement, si elle considère les risques maîtrisés, les avantages socio-économiques plus importants que les risques ET s'il n'existe pas de solutions de substitution.

Au sein du GIFAS, des groupes de travail se mobilisent pour tenter de décaler la date butoir d'interdiction d'utilisation du trioxyde de chrome affichée au 1ier janvier 2016, mais le GIFAS est conscient de l'urgence à rechercher et qualifier un substitut au trioxyde de chrome, même si un délai supplémentaire est obtenu.


Les partenaires du consortium ont déjà mené des travaux de R&D sur la substitution du trioxyde de chrome dans le cas de l'anodisation chromique. Dans cette gamme de traitement, le décapage sulfochromique a été remplacé par un décapage sulfonitroferrique, l'oxydation anodique chromique a été remplacée par une oxydation anodique sulfurique fine, et des travaux sont actuellement en cours dans le cadre du projet « APACA III » financé par l'appel à projet AEROSAT 2011 sur le développement d'un procédé de colmatage sans chrome hexavalent.

La couche d'anodisation étant isolante, ces nouveaux procédés ne pourront pas répondre aux besoins de conduction électrique de certaines pièces ou de certaines zones de la pièce traitée en anodisation. En général, dans ces cas là, il est appliqué un traitement de conversion chimique qui permet de former une couche d'oxydes/hydroxydes d'aluminium et de chrome de fine épaisseur (≤1µm), qui présente des propriétés anti-corrosion plus faibles que l'anodisation mais qui assure le passage d'un courant électrique à travers la pièce.
Le même consortium souhaite poursuivre sa collaboration fructueuse pour développer dans ce nouveau projet un procédé de conversion chimique exempt de chrome hexavalent en remplacement du traitement de conversion conventionnel Alodine 1200®.
Le besoin industriel est fort, ce qui explique le soutien technique pour ce projet de grands groupes donneurs d'ordre ou équipementiers comme AIRBUS, DASSAULT, SAFRAN (non partenaires du projet). Ils soutiennent notamment le développement de formulation de bains « maison », vu l'urgence de la situation et l'absence sur le marché de procédés commerciaux qui permettent de répondre aux exigences du secteur aéronautique. La réussite de ce projet sera par conséquent une véritable innovation dans ce secteur.